Alcool et médicaments psychotropes

Interaction alcool et médicaments psychotropes, ça donne quoi?

L’été est là, avec ses apéros au vin rosé en terrasse, mais il est important de comprendre les implications de la consommation d’alcool, surtout lorsqu’on prend des médicaments psychotropes. Les psychotropes, qui comprennent les anxiolytiques (comme les benzodiazépines) et les antidépresseurs, interagissent de manière complexe avec l’alcool, influençant le cerveau et le corps de différentes manières. Voyons ça d’un petit peu plus près…

Effets de l’alcool sur le cerveau et l’anxiété

L’alcool a un effet notable sur le cerveau, notamment en ce qui concerne l’anxiété. Au départ, il agit comme un sédatif léger, apportant une sensation de relaxation et de bien-être, raison pour laquelle il est souvent consommé lors de moments sociaux (ou simplement, en rentrant du travail) pour “décompresser” (ou bien atténuer le stress de la journée). Cependant, à mesure que le taux d’alcoolémie augmente, l’alcool peut perturber la coordination, altérer la mémoire et diminuer les capacités cognitives (et ça, qu’il y ait prise ou pas d’un traitement psychotrope).

En ce qui concerne l’anxiété, l’alcool peut temporairement réduire les symptômes grâce à son effet dépresseur sur le système nerveux central. Pourtant, cette solution est de courte durée, car à long terme, la consommation d’alcool peut aggraver les symptômes anxieux: en effet, une consommation régulière ou excessive peut entraîner une dépendance où le cerveau s’habitue à la présence d’alcool pour se sentir bien, créant un cercle vicieux d’augmentation de l’anxiété lors des périodes sans alcool (qu’un anxiolytique n’arrive hélas pas à atténuer)

Voyons maintenant la prise d’alcool avec des benzodiazépines, puis avec des antidépresseurs, puis enfin avec les 2..

1. Alcool et benzodiazépines (anxiolytiques)

Les benzodiazépines, comme le diazépam (Valium), le lorazépam (Ativan) ou l’alprazolam (Xanax), sont des médicaments anxiolytiques qui agissent sur le système nerveux central pour produire un effet calmant. Lorsqu’elles sont prises avec de l’alcool :

  • Effet dépressif accru: l’alcool et les benzodiazépines sont tous deux des dépresseurs du système nerveux central. Leur combinaison peut entraîner une sédation excessive, une somnolence, une diminution de la coordination et une altération de la fonction cognitive. Cela peut augmenter les risques d’accidents et de chutes.
  • Dépression respiratoire: une combinaison de ces substances peut provoquer une dépression respiratoire, une condition potentiellement mortelle où la respiration devient insuffisante.
  • Altération de la mémoire: les deux substances peuvent entraîner des troubles de la mémoire à court terme, augmentant les risques d’amnésie.
2. Alcool et antidépresseurs

Les antidépresseurs se divisent en plusieurs classes, mais les 2 interactions principales avec l’alcool concernent les inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS) et les antidépresseurs tricycliques (ATC).

  • ISRS (comme le fluoxétine (Prozac), la sertraline (Zoloft)):
    • Diminution de l’efficacité du traitement: L’alcool peut réduire l’efficacité des ISRS, aggravant potentiellement les symptômes de dépression (ce qui peut amener la personne à augmenter le dosage de son IRSS :-().
    • Augmentation de l’effet dépressif: Comme l’alcool est un dépresseur, sa consommation peut contrecarrer les effets des ISRS, menant à une augmentation de la dépression et de l’anxiété.
  • ATC (comme l’amitriptyline (Elavil), l’imipramine (Tofranil)):
    • Sédation accrue: l’alcool peut augmenter les effets sédatifs des ATC, entraînant une somnolence accrue.
    • Risque cardiaque: la combinaison peut entraîner une augmentation des effets secondaires cardiovasculaires, comme des troubles du rythme cardiaque.
Précisions : les antidépresseurs se divisent effectivement en plusieurs classes mais les interactions principales avec l’alcool concernent surtout les inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS).  

Augmentation de l’Effet dépressif  

Comme l’alcool est un dépresseur, sa consommation peut contrecarrer les effets des ISRS, menant à une augmentation de la dépression et de l’anxiété. Voici comment ces mécanismes fonctionnent :  

1-Dépresseur du Système Nerveux Central (SNC): l’alcool agit comme un dépresseur du SNC, ce qui signifie qu’il ralentit l’activité cérébrale. Cela inclut une réduction des niveaux de sérotonine, un neurotransmetteur crucial pour la régulation de l’humeur, que les ISRS visent à augmenter. En réduisant la sérotonine, l’alcool peut ainsi neutraliser les effets bénéfiques des ISRS.  

2- Effet contradictoire sur l’humeur : alors que les ISRS augmentent les niveaux de sérotonine dans le cerveau pour améliorer l’humeur et réduire l’anxiété, l’alcool, en tant que dépresseur, peut exacerber les sentiments de tristesse, de désespoir et d’anxiété. Cette opposition peut rendre les symptômes de la dépression plus sévères.  

3-Déséquilibre chimique : la consommation d’alcool perturbe l’équilibre chimique du cerveau. Alors que les ISRS travaillent pour rétablir cet équilibre en augmentant la disponibilité de la sérotonine, l’alcool peut provoquer un déséquilibre en réduisant la capacité des récepteurs de sérotonine à fonctionner correctement. Cela peut entraîner une aggravation des symptômes dépressifs et anxieux.  

Diminution de l’Efficacité  

L’alcool peut réduire l’efficacité des ISRS, aggravant potentiellement les symptômes de dépression. Les mécanismes de cette interaction incluent :  

1- Métabolisme hépatique : l’alcool et les ISRS sont tous deux métabolisés par le foie. Une consommation d’alcool peut induire les enzymes hépatiques (comme le cytochrome P450) qui métabolisent les ISRS, augmentant ainsi la dégradation des antidépresseurs et réduisant leur concentration sanguine. Cela signifie que moins de médicament est disponible pour exercer son effet thérapeutique.  

2-Compétition pour le métabolisme : l’alcool peut interférer avec le métabolisme des ISRS en compétition pour les mêmes enzymes. Cette interaction peut ralentir la métabolisation de l’alcool, conduisant à une augmentation de ses effets dépresseurs, tout en réduisant l’efficacité des ISRS.
 
3-Altération de la compliance (= concordance entre le comportement du “patient” et les prescriptions médicamenteuses) : la consommation d’alcool peut également affecter l’adhérence au traitement. Les personnes qui boivent régulièrement peuvent être moins enclines à prendre leurs médicaments correctement, soit en oubliant des doses, soit en arrêtant complètement leur traitement. Cela peut réduire l’efficacité des ISRS et entraîner une recrudescence des symptômes de dépression et d’anxiété.    
Alcool + benzodiazépine + antidépresseur

La combinaison de l’alcool AVEC des benzodiazépines et des antidépresseurs peut être particulièrement dangereuse :

  • Sédation et dépression respiratoire: Les effets dépresseurs combinés peuvent conduire à une sédation excessive et potentiellement à une dépression respiratoire.
  • Confusion et altération cognitive: l’alcool et les benzodiazépines altèrent la mémoire et la cognition, et cette combinaison avec les antidépresseurs peut amplifier ces effets.
  • Risque accru d’overdose: la combinaison augmente le risque d’overdose, car chaque substance amplifie les effets de l’autre.

En résumé, bien que l’apéro au rosé soit un plaisir estival, il est essentiel de rester vigilant quant aux interactions potentielles entre l’alcool et les médicaments, notamment les benzodiazépines et les antidépresseurs. Alors soyez vigilants…Sans oublier que toutes ces substances impactent aussi énormément la fonction et la santé hépatique

Sur ce, je vous souhaite un bel été…et donc pas trop arrosé ;-)

Véronique

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